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Le village de travailleurs


Curieuse trouvaille que celle d'un archéologue, sur le site des pyramides de Gizeh : Un étrange groupe de bâtiments, parfaitement alignés et sectorisés, à quelques encablures des sépultures royales. Il s'agit d'une petite ville qui fut construite exprès pour héberger les travailleurs qui se sont succédés sur les différents chantiers du plateau de Gizeh, au fil du temps.

C'est une découverte majeure car elle permit de faire disparaître définitivement l'idée que les pyramides ont été construites par des esclaves : C'est faux, il s'agissait d'ouvriers libres, fonctionnaires, et particulièrement bien nourris et soignés.

Village d'ouvriers

Village d'ouvriers


Une découverte récente

Aussi étonnant que ça puisse paraître un site archéologique aussi important que le plateau de Gizeh est loin d'avoir montré tous ces secrets... C'est très régulièrement que de nouvelles trouvailles sont faites, et souvent il s'agit de découvertes importantes. Ainsi la cité des ouvriers fut découverte en 1988 seulement, par Mark Lehner, archéologue. Mark Lehner est américain, il a derrière lui un passé de 30 ans de fouilles en Egypte. Ancien directeur de l'Ancient Egypt Research Associates, il a une approche inter-desciplinaires qui le fait aborder des chantiers par un biais multiple, au contraire de bon nombre de ses confrères de l'époque.

Si de nos jours il est normal d'aborder un chantier archéologique par différentes disciplines, ce n'était pas l'habitude à l'époque. Et c'est en partie ça qui lui permet de découvrir cette zone du plateau contenant les vestiges d'une ancienne ville ayant abrité les ouvriers qui travaillaient sur les chantiers des 3 pyramides et de leurs temples respectifs, bien sûr à des époques différentes.

Le cimetière de cette ville, lui, fut découvert - paraît-il - par hasard, à peu près à la même époque.


Où se trouve le village d'ouvriers ?

La cité ouvrière de Gizeh se trouve au Sud-Est des sépultures royales dont elles en étaient séparées par un grand mur que l'on a du mal à imaginer de nos jours. Le cimetière de la ville se trouve à l'Ouest de la ville, à une distance d'à peu près 500m. Là-bas se trouve une colline peu élevée au pied de laquelle ont été creusées les tombes des ouvriers. Les contremaîtres et les inspecteurs, qui avaient un grade plus élevé dans l'organisation du chantier, étaient enterrés dans des mastabas sur la colline elle-même.

Emplacement du village d'ouvriers

Son urbanisme

Les fouilles menées par l'archéologue américain Mark Lehner depuis les années 90 ont permis de faire une représentation urbanistique de la ville. Cette dernière était organisée le long de trois grandes rues parallèles orientées Est-Ouest. Les maisons qui les bordaient étaient destinées essentiellement à héberger les ouvriers, à leur permettre de manger et de s'organiser pour la vie quotidienne. Cette ville était entourée d'un grand mur dont on ignore la vocation, et encore plus si cette vocation a évolué dans le temps. Peut-être s'agissait-il d'un moyen de sécuriser cette foule d'ouvriers vis à vis de l'élite, ou le mur avait-il un rôle de protection religieuse du futur tombeau du pharaon ?

Pour l'instant, nul ne le sait vraiment. C'est aussi dans cette ville que se trouvaient les artisans nécessaires à la vie quotidienne : Boulanger, pour la nourriture, chaudronnier, pour le travail du cuivre (les principaux outils des ouvriers étaient en cuivre), médecin, etc.

Au Sud de la ville, hors des murs, se trouvaient deux zones distinctes. Celle du Sud-Est était dédiée à un grand centre administratif royal dont on imagine qu'il était un centre de décisions à l'échelle des ouvriers, et celle du sud-Ouest était dédiée aux logements de l'élite : Contremaître, inspecteurs des travaux. A noter aussi qu'il existait, près du bâtiment administratif, un bâtiment de stockage dont on ignore l'utilité mais qui devait probablement servir de stockage pour les outils et produits consommables du quotidien.

Les fouilles récentes montrent que la ville disposait de son propre port, à l'Est. Ca paraît surprenant de nos jours mais le Nil arrivait jusqu'au bord du plateau de Gizeh à l'époque, rappelons-nous que l'on parle d'une période vieille de 45 siècles. Or à ce moment, non seulement le Nil arrivait jusqu'à l'Est des pyramides, mais la région était une savane, pas le désert que l'on connait. D'où la présence de lions dans les écrits de l'époque, par exemple. La présence d'un port était donc tout à fait normal, et d'ailleurs c'est par bateau que parvenait sur le site certains matériaux que l'on ne trouvait pas sur place.


Le cimetière des ouvriers

Comme souvent en archéologie c'est un cimetière qui donne le plus d'informations sur les civilisations passées. Celui du village ouvrier est caractéristique de l'organisation très hiérarchisée de la société de l'Ancien Empire égyptien.

Situé à quelques centaines de mètres à l'Ouest de la ville, il est au pied d'une petite colline et se compose d'un grand nombre d'excavations dans le sol recouvertes de pierres assemblées de façon disparate, c'est à dire que, sans que ça soit une règle, les pierres recouvrant les tombes avaient des formes volontairement différentes les unes des autres.

Au sommet de la colline et sur ses flancs se trouvent d'autres tombes, mais beaucoup plus travaillées, plus grandes aussi. Elles étaient utilisées par les personnes responsables d'une partie du chantier, comme celle consistant à assurer l'acheminement des pierres ou leurs tailles. Ces responsables disposaient de mastabas en pierre sèche, la plupart du temps voûtée. Ils étaient séparés les uns des autres par des petites rues étroites, un peu comme dans les cimetières que l'on trouve en Europe, tout à fait classiques. Certains mastabas avaient un escalier ou un petit chemin. Ils étaient parfois gravés du titre de leurs propriétaires, c'est ainsi que l'on connait, pour eux, leurs attributions sur le chantier.


Quelles étaient les conditions de vie des ouvriers ?

Non, les ouvriers qui ont construit les pyramides du plateau de Gizeh n'étaient pas des esclaves. C'était au contraire des hommes libres, fonctionnaires du royaume, et disposait à ce titre d'une rémunération et de soins particuliers.

Ce sont les fouilles du village de travailleurs qui nous permettent de dire ça, bien sûr. Les traces de fractures qui peuvent comporter certains squelettes déterrés montrent que celles-ci ont été soigneusement réduites et soignées, preuve du soin que l'on apportait aux travailleurs locaux. Ces squelettes nous apprennent aussi qu'ils travaillaient sur de lourdes charges, les colonnes vertébrales étant souvent déformées.

D'un point de vue vie quotidienne, il n'est pas évident de s'imaginer ce que c'était. Les restes archéologiques montrent que les ouvriers mangeaient plus de protéines que la population, ils étaient donc mieux nourris.

Mieux nourris, mieux soignés, payés correctement, on est loin de s'imaginer si ça valait le coup de se faire employer sur un chantier à Gizeh, mais il semble que d'un point de vue purement factuelle, la réponse soit oui.



Voir aussi :

Nécropole de Gizeh

Liste des pyramides d'Egypte





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